Mon oncle Marcel qui vague vague près du métro Berri

J'ai vagué dans les rues de la ville à la recherche d'une partie oubliée de moi-même. J'ai fini par partager la bouteille de mon oncle Marcel près du métro Berri. Nous avons ri en nous roulant dans le gazon que recouvrait déjà un frimas d'automne. Et puis novembre est apparu et Marcel fut touché en plein coeur par l'éclat acéré du rire sournois d'un usurier. J'ai dû m'accrocher aux basques de son manteau déchiré lorsqu'il s'éleva entre les buildings glacés (pour rien au monde je n'aurais voulu perdre Marcel). Dans le ciel blafard, quelques étoiles à peine nous accueillirent. C'était très humide. Marcel toussait. D'un geste vaste, il me montra les clochards oubliés qui flottaient en orbite, la mine réjouie, autour d'une grosse bière.

Au petit matin, Marcel avait disparu. Seuls, sous l'enseigne du métro, quelques éclats de bouteilles pour accompagner la douleur de vivre. 

Me voilà à nouveau à vaguer dans la grande ville.

Parfois, à travers l'appel lancinant des sirènes, la nuit, il m'arrive d'apercevoir Marcel émergeant du cul d'une bouteille. Ce sont alors des rencontres célestes.